Une petite introduction aux coordonnées barycentriques et homogènes...

(niveau bac à cause d'un déterminant, mais niveau seconde pour l'essentiel)

NB : l'expression ssi veut dire "si et seulement si".

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Mais, en fait, c'est la même théorie sous-jacente : l'algèbre linéaire.

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Sur une droite (D), le milieu M de deux points A et B, de coordonnées respectives a et b dans un repère (O,i) de D, a pour coordonnée (a+b)/2,.

Mais : le même point M résulte aussi d'une combinaison vectorielle OM = 1/2(OA+OB), et ceci même si l'origine O se trouvait hors de la droite ! Autrement dit, dans tout repère (OA,OB), le milieu M des points A et B a pour coordonnées1/2 et 1/2, ces deux nombres ne dépendent pas de l'origine choisie !

Telle est l'idée de base des coordonnées barycentriques (et des coordonnées projectives) :

On dira :

Les professionnels écriront carrément

M =1/2 A + 1/2 B

(une telle combinaison de points est appelée combinaison "affine").

On remarquer que la somme des coefficients est 1. En effet, de manière générale, pour tout point P défini par OP=xOA+yOB, l'égalité x+y=1 est vérifiée ssi P se trouve sur la droite (AB).

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Ce point de vue se généralise en toutes dimensions : un point du plan sera représenté par 3 coordonnées de somme 1, dans un repère constitué de 3 pts (non alignés), un point de l'espace sera représenté par 4 coordonnées de somme 1, dans un repère constitué de 4 pts (non alignés), etc.

Ainsi, les coordonnées barucentriques (appelées aussi coordonnées affines) du centre de gravité du triangle [ABC] sont (1/3,1/3,1/3). Le point de coordonnées (0,1/2,1/2) est le milieu de [BC], etc.

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On peut ajouter une idée supplémentaire : celle des coordonnées homogènes (dites aussi projectives ).

Reprenons notre exemple du début : dans le repère (OA,OB), avec O hors de la droite D, les points de coordonnées (1,1) ou (-2,-2) ou (7,7) ne sont pas sur la droite D, mais, vus de O (en perspective), ces points sont dans la même direction que le point M, milieu de [AB] : on peut donc considérer toutes ces paires de coordonnées comme équivalentes, représentant la même direction, celle de la droite (OM) : en ce sens "projectif", ces paires de coordonnées représentent toutes le point M de la droite (D).

On dira que les coordonnées projectives de M sont (1,1), ou (1/2,1/2), ou (-2,-2), ou (7,7), étant entendu que ces coordonnées sont définies à un facteur multiplicatif près, quelconque mais non nul.

Dans le plan, les coordonnées projectives du centre de gravité d'un triangle ABC, définies par un repère OA,OB,OC avec O hors du plan (ABC), sont (1,1,1), celles de A sont (1,0,0), celles du milieu de BC sont (0,1,1), etc.

Pour que des nombres soient les coordonnées projectives d'un point, une seule condition est nécessaire (et aussi suffisante !): leur somme est non nulle.


**Premiers pas de calcul barycentrique**

Lorsqu'un point M divise un segment AB dans le rapport r (autrement dit si r=MA/MB, les mesures MA et MB intervenant avec leur signe), ses coordonnées barycentriques sont (1/(1-r) , -r/(1-r)), et, plus simplement, ses coordonnées projectives sont (1,-r), ou encore(-1,r).

Autrement dit,

(1) M est de coordonnées barycentriques (ou projectives) (x,y) dans le repère (A,B), ssi on a MA/MB=-y/x

ou encore

(1') M est de coordonnées barycentriques (ou projectives) (x,y) dans le repère (A,B) ssi MA et MB (en mesure algébriques) sont proportionnels à -y et à x respectivement.

Pour maîtriser les calculs barycentriques ou projectifs, il faut les pratiquer, en gardant toujours à l'esprit que l'on travaille d'une manière vectorielle avec une dimension de plus : ténacité et patience...!


**Deux exemples classiques : les théorèmes de Menelaus et de Ceva**

Voici deux exemples classiques dans le plan, traitant de points pris sur les cotés d'un triangle ABC non dégénéré.

Soit P sur (BC), Q sur (CA), R sur (AB) . On supposera, sans perte en généralité, que les coordonnées projectives de ces points sont respectivement :

(0,q,r) (p,0,r) et (p',q,0).

**Exemple 1. Les POINTS P,Q,R sont-ils ALIGNÉS ?**

cela se produit ssi (si et seulement si) le déterminant de la matrice

0 q r

p 0 r

p' q 0

est nul : le calcul fait, cette condition s'écrit pqr+p'qr=0 ou encore p=-p'.

Conclusion :

Ceci est une reformulation du célèbre théorème de Menelaus :

(En effet le produit de ces rapports est, d'après (1), -r/q.-p/r.-q/p', soit -p/p' après simplication.)

 

**Exemple 2. Les DROITES (AP), (BQ) et (CR) sont-elles CONCOURANTES ?**

Un point variable de la droite (AP) a pour coordonnées projectives (x,q,r)

Un point variable de la droite (BQ) a pour coordonnées projectives (p,y,r)

Un point variable de la droite (CR) a pour coordonnées projectives (p',q,z)

(x,y,z sont des variables)

Pour le point S d'intersection de (AP) et (BQ), on doit avoir x/p=q/y=r/r, autrement dit x=p et y=q

Donc :

C'est très simple !! (au passage on note que p+q+r=0 signifie que (AP) et (BQ) sont parallèles)

Le point S se trouve sur la droite (CR) ssi p'/p=q/q=z/r d'ou p'=p et z=r

Conclusion :

C'est une autre formulation du célèbre théorème de Céva ('dual' du théorème de Ménélaus)

(En effet le produit de ces rapports est, d'après (1), -r/q.-p/r.-q/p'=-p/p')


**Deux autres exemple avec des mesures de longueur et d'angles**

ATTENTION, si on veut des relations métriques, c'est délicat, même avec des coordonnées barycentriques et non projectives: en effet, a priori, la base (OA,OB,OC) de l'espace n'est pas orthonormée !

Le mélange longueur-angle-coordonnées barycentrique est donc à manier avec précaution !

**Exemple 3 : hauteurs d'un triangle**

Soient a,b,c les longueurs des 3 cotés opposés aux angles A,B,C, respectivement.

Soient (0,q,r) les coord. proj. du pied H de la hauteur issue de A

BH et CH sont proportionnels à -c.cosB et b.cosC

donc, d'après (1') on a (0,q,r) prop. à (0,b.cosC,c.cosB)

Remarque : AH.BC=0 (produit scalaire dans une base orthonormée) s'écrit AH.AB=AH.AC , d'où hcsinB=hbsinC et b/c=sinB/sinC ou encore sinB/b=sinC/c. On en déduit l'égalité générale reliant les cotés et les angles d'un triangle :

En multipliant par sinB/b=sinC/c les coordonnées projectives précédentes on obtient

(0,sinBcosC,sinCcosB) soit après division par cosCcosB (les angles C et B étant alors supposés non droits) :

(0,tanB,tanC)

Par permutation circulaire on en déduit les coordonnées des autres pieds de hauteur :

(tanA,0,tanB) et (tanA,tanB,0)

D'après (4) et (3), et en réglant à part le cas (évident !) des triangles rectangles, on obtient finalement :

 

**Exemple 4: bissectrices intérieures d'un triangle**

Soit A' le pied de la bissectrice intérieure issue de A avec pour coordonnées projectives (0,q,r), dans le repère ABC. Les nombres q et r sont de même signe (car il s'agit de bissectrice intérieure). Quitte à multiplier les coordonnées par -1, on peut donc supposer q et r positifs.

Soit B" et C" les projections orthogonales de A' sur (AB) et (AC) respectivement.

A'B et A'C (mesures algébriques) étant proportionnels à -r et à q ,

A'B" et A'C" (mesures algébriques) sont proportionnels à rsinB et à qsinC

Ces quantités ont égales donc r et q sont proportionnels à sinC et à sinB.

d'où les coordonnées projectives de A' :

(0,sinC,sinB)

Pour les autres pieds de bissectrices, B' et C' on aura :

(sinC,0,sinA) et (sinB,sinA,0)

Ici, on ne voit pas immédiatement la concourance des bissectrices.

Mais en utilisant (6), on peut réécrire les coordonnées projectives de A',B' et C' sous la forme

Alors, d'après (4) et (3), les bissectrices d'un triangles sont concourantes et le point de concours (centre du cercle inscrit) vérifie :

 

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L A B O R A T O I L E

MATh . en . JEANS

 

La recherche mathématique par internet

http://laboratoile.free.fr/

 

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